L'aventure automobile de Jean Rédélé
C'est dans une alcôve qui domine le coeur de la capital, que j'ai eu l'honneur et l'immense joie d'admirer les créations de la marque Alpine. Les quelques photos que j'ai rapportées me donne enfin l'occasion d'effleurer la passionnante histoire de Jean Rédélé.
A l'origine de cette extraordinaire aventure, un homme audacieux et visionnaire, doué d'un sens aigu de la communication, qui va dédier sa vie à l'automobile sportive française.
Jean Rédélé naquit à Dieppe en 1922, il a grandi au sein du garage que tenais son père Emile. Agé de 24 ans, Diplôme de HEC en poche, il reprend l'affaire familiale qui a terriblement souffert de la guerre et se voit attribuer la concession Renault de Dieppe. Il devient ainsi le plus jeune concessionnaire Renault de France.

Son coup de volant, va lui permettre d'engranger de nombreuse victoire de 1951 à 1954 au volant d'une 4 CV préparée par ses soins. Il remporte entre autre dans sa catégorie ou au général, le Rallye de Dax, le rallye d’Evian Mont-Blanc, le Tour de Belgique, le rallye Liège-Rome-Liège, Mille Miles, le Tour de France automobile, la Coupe des Alpes...
Il se rend rapidement compte que l'aérodynamique de la 4 CV limite sa vitesse de pointe, en 1952 il entreprend la construction d'un prototypes sur la base mécanique de la 4 CV. Le dessin est réalisé suivant le croquis de Jean Rédélé par le styliste italien Giovanni Michelotti. La réalisation est confiée au carrossier turinois Serafino Allemano.
Ce coupé baptisé ''Renault Spéciale'', permettra en 1953 à Jean Rédélé, de monter sur la plus haute marche du podium du Rallye de Dieppe, la Coupe des Essarts et le rallye de Lisbonne (cat).

La raison l'emporte sur le coeur, il vend son prototype ''Rédélé Spéciale'' à son ami Jean-Claude Galtier.
Le Coach commandé par Charles Escoffier est dessiné par Jean Gessalin. Les frères Chappe qui sont spécialisés dans les nouveaux matériaux composites vont le carrosser. L'assemblage sera réalisé dans les locaux du garage Escoffier, rue Forest à Paris. Il sera présenté au nouveau PDG de la Régie, Pierre Dreyfus et au salon de l'auto de Paris 1955, sous le nom de Alpine ''Mille Miles''.
La photographie du Coach A106 de 1957 a été réalisée au manoir automobile de Lohéac, où l'on peut admirer de nombreux modèles de la gamme Alpine.
La formidable aventure d'Alpine vient de commencer son ascension vers les sommets.

En 1958 la gamme A106 est épaulée par l'A108 cabriolet, les éléments mécaniques sont issues de la Renault Dauphine qui supplante la 4 CV.

Elle était déclinée en trois motorisations, 845, 904 et 998 cm3, accouplé à une boîte 4 ou 5 vitesses.


Les licences sont accordées à des sociétés déjà en contact avec la Régie, ce qui simplifie énormément l'approvisionnement des composants mécaniques, la distribution et l'entretien.
La marque américaine Willys connu dans le monde entier pour sa Jeep, a fabriqué sous licence à Sao Paulo au Brésil, le coupé, le cabriolet et la Berlinette Alpine, sous l'appellation de ''Interlagos''. L'appellation fait référence au circuit de Grand Prix, tout un symbole.

L'appellation Dinalpin est la contraction des deux marques.


Comme Ferdinand Porsche qui a élaboré la 356 avec un maximum de pièces Volkswagen, Jean Rédélé mènera ce concept très loin en empruntant le maximum d'organe aux Renault.
L'utilisation de pièces issus de voiture d'un grand constructeur permettaient de contenir les coûts et de faciliter l'entretien.

Les solutions adopter par l'équipe d'Alpine sont rationnelles :
- éléments mécaniques empruntés à un modèle de série, la toute nouvelle Renault 8,
- châssis-poutre afin d'améliorer la rigidité et allégé la voiture,
- carrosserie en fibre de verre aux lignes aérodynamiques et sportives.
L'A110 Berlinette verra de nombreuses évolutions au fil de sa carrière. Notamment la motorisation qui suivra la sortie de nouveaux moteurs chez Renault.
Elle s'impose rapidement en compétition, mais il faudra quelques années pour qu'elle démontre qu'avec des motorisations plus dignes de ses qualités dynamiques, qu'elle était bien la reine des rallyes.

Le coupé était carrossé par les frères Chapppe sur un châssis-poutre allongé, la mécanique est de type R8.

L'ensemble des compteurs sont regroupés sous une unique visière.

En 1971, Les Alpine A110 ont permis entre autres, aux pilotes, B. Darniche, J.P. Nicolas, O. Andersson, J.C. Andruet, J.L. Thérier, J. Vinatier, de remporter le rallye de Monte-Carlo, le Lyon-Charbonnières, le San-Remo-Sestrières, l'Acropole, la coupe des Alpes, le rallye du Portugal...
Offrant ainsi à Alpine son premier titre de Champion d'Europe des constructeurs.
Les voitures dieppoises confiées à O. Andersson, J.C. Andruet, B. Darniche, J.P. Nicolas et J.L. Thérier apporteront en 1973, le premier titre de Champion du Monde des rallyes à Alpine avec 155 points, Fiat est deuxième avec 89 points et Ford troisième avec 76 points.
La victoire Mondiale en poche, le budget alloué par Renault pour les rallyes sera réaffecté au programme Endurance en 1974.

La Renault 5 Alpine a été commercialisée en 1976, afin d'apporter une touche de sportivité à la gamme en utilisant la notoriété d'Alpine.
Elle est dotée d'un 4 cylindres de 1397 cm3 dont la puissance culmine à 90 ch. Une puissance inférieure aux 110 ch de la Golf GTI dévoilée la même année.
Malheureusement, la décennie 1970 n'est pas faste pour les constructeurs automobiles. La guerre du Kippour a débouché sur la flambée du cours du pétrole, les limitations de vitesse apparaissent sur nos routes.
En 1973, La marque Alpine voie sa courbe des ventes s'effondrer, Renault s'empare de 55% des parts de la société et impose ses volontés, en 1974, Jean Rédélé tire sa révérence en cédant le reste de ses parts à Renault.

Six ans se sont écoulés quand Renault présente une première évolution du coupé A310 1600 cm3 qui sur le plan sportif et commercial n'a pas obtenue la réussite escomptée.
L'A310 est modifiée de façon significative, elle adopte un nouveau moteur V6 2700cm3 d'origine Peugeot Reunault Volvo, des nouveaux trains roulants, une nouvelle lignes... c'est une nouvelle GT qui peut enfin s'attaquer à la concurence allemande, pour ne pas la nommer.

L'A610 est la dernière ''Alpine'' à être sortie des chaînes de Dieppe. Elles reposent sur les mêmes bases qu'une Berlinette A110, châssis poutre, moteur en position arrière, carrosserie en matériaux composites...
Renault récupérera l'usine de Dieppe afin d'y construire le Spider et l'Espace.
